S'il y a bien une chose qui est difficile à estimer et à comprendre lorsqu'on produit un disque ou un concert, c'est le montant des cachets. Chaque activité artistique est régie par une convention collective, et si l'une s'applique pour le disque, deux s'appliquent pour le spectacle vivant (enfin, plutôt, il faut faire le choix d'une d'entre elle en fonction de son secteur d'activité principal, mais on en reparle plus bas).
Cet article passe en revue les principes de ces trois conventions collectives, à savoir la CCNEP, la CCNEAC et la CCNSVP, et explique la méthode de calcul pour le disque et pour le spectacle.
Cet article est aussi un extrait d'une fiche pratique qui se trouve dans la Mission Admin & Subventions, que tu peux acheter pour 127€, et qui comprend également un calculateur automatique de cachets. Au delà de cette fiche, tu trouveras aussi dans cette formation :
• Un avant-propos sur la structuration dans la musique en tant qu'indé
• Une liste compréhensive des subventions pour structures indépendantes avec leurs critères d'éligibilité majeurs (pour un projet se déroulant en France ou à l'étranger)
• Et des fiches pratiques sur le dossier auto-production Sacem, sur l'argumentaire budgétaire et le plan marketing – deux pièces quasiment systématiquement demandées dans les dossiers de subventions.
Et si tu ressens le besoin d'être accompagné-e dans tes démarches admin, n'hésite pas à nous faire un mail. Bonne lecture !
Avant même de monter un budget, il est important de savoir à quelle convention collective on appartient. Pour la connaître : il faut se référer au code APE de sa structure – si tu as une activité de label, tu ne vas pas avoir le même code APE qu'une structure de production de spectacle.
Le code APE détermine, en fonction de ton objet social (= ce que fait ta structure) ton activité principale. Il existe deux codes APE principaux dans le monde de la musique pour les structures productrices :
• 5920.Z : enregistrement phonographique (= production de disque / label)
• 9001.Z : spectacle vivant (= production de spectacle)
Selon le code APE, une convention collective s'applique :
• 5920.Z : on applique la convention collective de l'édition phonographique (= CCNEP)
• 9001.Z + revenus issus de sources publiques* : on applique la convention collective des entreprises artistiques et culturelles (= CCNEAC)
• 9001.Z + revenus issus de sources privées** : on applique la convention collective du spectacle vivant privé (= CCNSVP)
*Revenus publics : revenus issus d'une mairie, d'un centre culturel, d'un établissement public...
**Revenus privés : revenus issus de salles de concerts, de festivals, de cafés concerts... La majeure partie des associations productrices de spectacle vivant dans la musique appliquent la CCNSVP.
Chaque convention collective définit le montant minimum des cachets d'interprétation.
Il y a cependant une nuance à apporter : si tu as une structure de production de spectacle mais que tu produis un disque avec cette structure (ce qui est possible, et cela ne t'empêche d'ailleurs pas de prétendre aux aides au disque), tu dois obligatoirement te référer aux montants des cachets de la CCNEP. Même si ce n'est pas ta convention collective. Tu passeras pour émettre ces cachets par un gestionnaire de paie (CulturePay, Chèque Intermittent, Movinmotion...)
Il en va de même dans le spectacle, sauf qu'au lieu de passer par un gestionnaire de paie, tu passeras par un organisme qui s'appelle le GUSO. C'est un organisme par lequel tu passes lorsque tu n'as pas la licence d'entrepreneur de spectacle et que tu produis moins de 6 dates par an. L'une des deux conventions collectives du spectacle vivant sera alors à appliquer dans ton espace GUSO lorsque tu voudras émettre un cachet, et ce en fonction du champ d'activité de la structure (= une mairie dépendra plus de la CCNEAC, tandis qu'un label dépendra plus de la CCNSVP)
Il est donc important de connaître les trois conventions collectives et les montants de cachets qui vont avec!
Pour cette convention collective, je te conseille vivement de te référer à la fiche mémo de la Félin, qui répertorie tous les cas particuliers de rémunération. Me concernant, je vais surtout me concentrer sur les musiques actuelles, et en particulier sur les artistes principaux (= lead) et sur les artistes d'accompagnement (= musiciens studio).
Les artistes principaux sont payés à la minute enregistrée. Il y a deux cas de figure :
• Moins de 20min enregistrées : le montant global des cachets est forfaitaire, ce qui veut dire fixe. Il équivaut à 599,46€ brut. Ce montant peut être "découpé" en plusieurs cachets unitaires*.
• Plus de 20min enregistrées : là, on applique un montant à la minute. Chaque minute enregistrée est payée 32,97€ brut.
Exemple :
• Ton EP fait 13min. Tu es donc en dessous de 20min enregistrées. En tant qu'artiste lead ou artiste solo, tu dois donc te verser un montant global de cachets (cachets de 3h) au moins équivalent à 599,46€ brut.
• Ton album fait 45min. Tu es au-dessus de 20min, donc tu es payé-e à la minute. Le montant global de tes cachets bruts doit être au moins égal à 45 x 32,97€ brut = 1 483,65€ brut.
À ceci s'ajoute des charges patronales. Pour ça, il faut augmenter le-s cachet-s brut-s d'environ 53%.
Ce calcul s'applique à toustes les artistes principaux-ales de ton projet : si tu es artiste solo, alors tu es læ seul-e artiste principal-e, si vous êtes un groupe de 4 et que sans l'un-e des membres, le groupe ne peut pas enregistrer ni jouer, alors vous êtes 4 artistes principaux-ales.
Les artistes d'accompagnement sont dans le cas de l'enregistrement d'un disque, les musicien-nes studio que tu viens solliciter pour l'occasion. Par exemple, tu as besoin d'enregistrer des parties de batterie, tu fais appel à un-e batteur-euse, cette personne ne fait pas partie intégrante du projet, c'est donc un-e artiste d'accompagnement.
Ces artistes sont payé-es à la journée, et le plus simple est de se référer au montant journalier minimum, à savoir 185,82€ brut par jour d'enregistrement. Donc si la personne est mobilisée trois jours, il faut lui faire trois cachets brut à ce montant.
Là aussi, s'ajoute les charges, à 53% environ du cachet brut.
*Cachet unitaire : si tu as une société, tu es éligible au FONPEPS ADEP. J'en parle plus bas.
Pour les clips, sont rémunérés au taux de la convention collective les artistes interprètes qui apparaissent à l'image. Le montant minimum par jour de tournage est de 253,55€ brut par jour. Ce montant peut être là aussi versé sous forme de plusieurs cachets (par exemple, deux cachets de 127€ brut).
Pour cette convention collective, cette fois, je te conseille de te référer à la fiche mémo de la Philharmonie de Paris. Elle reprend exactement ce que disent les deux conventions collectives du spectacle vivant, à savoir la CCNEAC et la CCNSVP. Ici, on va se référer d'abord à la deuxième, car elle va concerner la majorité des artistes producteurices de leurs concerts.
Est artiste producteurice de concert un-e artiste ayant une structure (association ou société) qui est en capacité de vendre des concerts (= contrat de cession de spectacle, il en existe d'autres mais celui là est le plus commun), et d'émettre des cachets pour embaucher le plateau artistique et technique, à savoir les artistes sur scène et les technicien-nes son et lumière qui travaillent sur une date.
L'émission des cachets se fait soit via le GUSO si ta structure n'a pas de code APE lié au spectacle vivant et qu'elle produit moins de 6 dates par an, soit via un gestionnaire de paie. Tu en trouveras quelques exemples dans la Boîte à Outils sur cette plateforme de formation.
En ligne, tu vas trouver ÉNORMÉMENT d'informations contradictoires concernant les minima pour les cachets de spectacle vivant. Au début, je ne savais absolument pas où donner de la tête – c'est le montage d'un dossier CNM d'aide à la production et à la diffusion pour une de mes artistes qui m'a permis de mettre le nez dedans, et surtout le nez dans les conventions collectives, à l'aide de personnes compétentes.
Les infos qui se trouvent dans la fiche mémo de la Philharmonie de Paris sont correctes et sont les minima à appliquer pour demandes des subventions. Il existe peut-être des cas particuliers mais je ne vais pas me concentrer dessus – aussi parce que le live n'est pas du tout mon coeur de métier.
Pour la CCNSVP, elle est assez simple : on se réfère aux musiciens des musiques actuelles, on regarde la jauge de la salle dans laquelle on va se produire, et on regarde le montant minimum du cachet correspondant. Pour les répétitions, c'est simple aussi.
Pour la CCNEAC, les choses se compliquent un peu : on parle de cas général ou de cas particuliers pour déterminer le montant du cachet minimum.
Relèvent du cas général tous les spectacles qui ne correspondent pas aux cas suivants : première partie, plateau découverte (= showcases de 45min), salle de moins de 300 places, répétitions. Tout le reste (tête d'affiche, coplateau, festival...) rentre dans le contexte du "cas général".
Pour les spectacles scolaires (par exemple, une restitution dans le cadre d'une action culturelle), on prend en compte la jauge de la salle dans laquelle la restitution a lieu. Si elle fait moins de 300 places alors on se réfère à ce minima, si elle fait plus de 300 places, on se réfère au cas général.
Les premières parties sont quant à elles considérées comme un "plateau découverte", donc le minima qui s'applique est de 116,34€ brut.
Je te l'avait dit, c'est franchement pas évident à suivre...!
Tu as envie de te faciliter la vie et de mettre directement en pratique ce que tu viens d'apprendre? Direction la Mission Admin & Subventions pour retrouver le calculateur automatique de cachets dans la fiche pratique "Estimer le montant des cachets (disque et spectacle" en fin de formation. Et tu y retrouveras beaucoup d'autres informations qui te serviront à monter tes dossiers de subvention par toi-même!
Dans cet article :
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